Casalino Pierluigi
lunedì 3 maggio 2021
Le Neveu de Rameau
A la différence de Voltaire et de Rousseau qui ont mis beaucoup de soin à la publication de leurs oeuvres, Diderot entretient un rapport très particulier avec ses propres écrits, avec lesquels il ne fait pas véritablement corps et qu'il ne signe pas toujours. Après avoir été responsable pendant vingt ans de la rédaction et de la fabrication de ce livre majeur qu'est l'Encyclopédie, il semble avoir été rebuté par l'aspect matériel de l'entreprise littéraire et n'a pas souhaité que ses textes prennent la forme de livres. A sa mort, l'oeuvre est très dispersée et fondue dans des ensembles collectifs comme l'Encyclopédie ou manuscrits comme la Correspondance littéraire, si bien que le temps est encore loin en 1784 où l'on pourra prétendre ranger sur les rayons de la bibliothèque ses œuvres complètes. Aujourd'hui, on n'en finit pas de reconnaître sa voix, perdue ça et là, dans un concert anonyme. Dans le labyrinthe de cet ensemble si complexe, Le Neveu de Rameau est l'ouvrage le plus énigmatique, avec des marges concertées de silence. C'était le pari du génie et surtout une façon d'aménager la force et le mystère de l'œuvre. Puzzle truqué à plusieurs figures, inapte à renvoyer une image simple de l'auteur, Le Neveu de Rameau est un organisme secret, mobile traversé d'airs, composé bizarre et sublime. Diderot réussit ce paradoxe de transcrire et de fixer méthodiquement le souffle décousu et décomposé d'un maître de la parole dans ce qu'il a d'éphémère et de périssable, et de trouver son style propre en contrefaisant en second l'inconsistance d'une mimétisme stérile. La bombe du Neveu de Rameau, pour reprendre l'expression de Goethe, est un manifeste de l'art nouveau.
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